
Un enthousiasme communicatif pour le focusing et l’approche centrée sur la personne
Dans cet épisode, nous sommes à l’écoute de Nathalie Cabrita, qui nous partage à quel point le focusing et l’approche centrée sur la personne ont amélioré sa vie personnelle et professionnelle.
Je suis infirmière depuis 30 ans. J’ai exercé dans divers services, notamment en réanimation et en pneumologie et maintenant depuis plusieurs années je suis en oncologie. Depuis le début de ma pratique infirmière j’ai été intéressée par la relation d’aide. Déjà toute jeune infirmière je faisais des stages qui étaient proposés à l’hôpital en lien avec l’accompagnement des familles endeuillées, le processus de deuil, des choses qui tournaient autour de l’accompagnement.
Ensuite ce sont mes difficultés personnelles qui m’ont amenée à entrer dans le développement personnel et à 40 ans, j’ai rencontré le focusing et là ça a vraiment changé ma vie de manière positive. Je me suis développée et je suis allée explorer plein d’aspects de ma vie et je crois que j’ai commencé peu à peu à prendre ma place, à prendre de plus en plus de place, à développer de nouvelles compétences, à explorer de nouveaux chemins et depuis je suis vraiment portée par cette pratique du focusing qui a vraiment enrichi ma vie professionnelle et personnelle, les deux, pas plus l’un que l’autre. Je crois qu’il y a vraiment quelque chose qui se fait en parallèle et j’ai eu la chance de voir aussi ma vie professionnelle vraiment évoluer.
Tu évoques cette rencontre avec le focusing, c’était il y a combien de temps ?
La toute première fois que j’ai rencontré le focusing, c’était il y a une quinzaine d’années. Ce n’était pas avec l’IFEF, c’était un peu avant, mais ce n’était pas enseigné comme l’IFEF l’enseigne. Mais ça avait éveillé ma curiosité et j’avais appris à rester avec la sensation, ce qui était déjà le premier pas dans le processus du focusing. Et puis, un jour, on m’a parlé d’une formation dédiée au focusing.
Je t’avoue que j’ai été très surprise : comment ça une école juste pour le focusing, pour apprendre à être avec la sensation ? Donc je suis allée sur le site internet de l’IFEF et j’ai lu la proposition du séminaire d’été. Là, j’ai senti quelque chose de tellement vivant en moi, que je n’avais pas d’autre possibilité, c’était une évidence, il fallait que j’y aille. Il y avait quelque chose qui s’est vraiment imposé à moi.
Donc je suis venue il y a douze ans, la première fois, au séminaire d’été, je suis arrivée, je ne connaissais personne, et là j’ai vécu un processus extraordinaire sur cinq jours, mais d’une richesse, d’une telle richesse que depuis, ça ne m’a pas quitté, et ça nourrit ma vie depuis.
Donc il y a une quinzaine d’années, il y a eu cette découverte du focusing, et puis cette évidence quand tu as pris connaissance du séminaire, une expérience apparemment assez exceptionnelle, une rencontre, qui nourrit ta vie, et puis comme tu disais, qui aussi nourrit ta vie professionnelle, tu peux dire un peu plus peut-être qu’est-ce que ça t’apporte dans ta vie ?
Au niveau professionnel, ça a vraiment développé ma qualité d’écoute. À l’école d’infirmière, on nous parle de la relation d’aide, de l’écoute, on nous cite Carl Rogers, mais ce ne sont que des cours théoriques, on ne va pas plus loin.
Juste pour préciser, donc jusque-là tu parlais du focusing, et puis maintenant tu parles de Carl Rogers ?
Oui, parce qu’il y a vraiment un lien entre les deux, parce que Eugène Genlin était un collaborateur de Carl Rogers. Carl Rogers, c’est le père de la psychologie humaniste, c’est lui qui a créé ce qu’on appelle l’approche centrée sur la personne, qui est une manière d’écouter. C’est Eugène Genlin qui a enrichi les travaux de Carl Rogers. Donc ces deux hommes ont travaillé ensemble, et l’IFEF, la spécificité de l’IFEF, c’est qu’on nous apprend l’ACP/Focusing. Parce que le focusing sans l’ACP ce n’est qu’une recette de cuisine en fait. S’il n’y a pas cette posture d’ACP, on ne va pas aller loin dans l’accompagnement, on ne va pas être bon.
Donc si je comprends bien, il y a à la fois cette notion de découvrir la sensation et puis de faire tout un travail autour de la sensation, et cette posture d’écoute qui est plus spécifique alors à l’approche centrée sur la personne. Les deux viennent enrichir ton cheminement ?
Oui, c’est vrai qu’avant d’être formée à l’ACP focusing, à l’hôpital, je pensais savoir écouter, et en fait je ne savais pas du tout écouter. Je crois que ce qui était présent, c’est l’intérêt pour les gens, parce que j’étais vraiment intéressée et bienveillante envers les patients. Mais c’est après avoir été formée à l’écoute que j’ai découvert que je ne savais pas écouter avant. Ça a vraiment ouvert quelque chose pour moi et pour les patients aussi, et pour mes collègues. Il y a vraiment une autre dimension qui a été introduite.
C’est comme si tu avais découvert une nouvelle dimension de l’écoute. Qu’est-ce qui t’a permis de t’en rendre compte ?
Quand c’est là, c’est tellement plus riche, la sensation…
C’est ça, c’est une sensation, quand tu es dans ces temps d’écoute, qui est beaucoup plus riche.
C’est vraiment quelque chose qui va permettre à l’autre de creuser, à la personne d’aller plus loin, même dans l’expression tout simplement de ses besoins. Juste par l’écoute, sans même parler d’aller plus dans le focusing, mais juste en étant là, présent, parce que le fait de pratiquer le focusing, ça fait qu’intérieurement il y a quelque chose qui se passe en moi, où je vais dans la profondeur.
Et le fait d’aller dans ma propre profondeur…
En tant qu’écoutant, c’est ça, donc en étant toi au contact de ta profondeur grâce aux ressources du focusing…
… il y a quelque chose qui se passe chez le patient, qui va être également connecté, plus en lien avec lui-même et du coup l’expression de ses besoins va pouvoir se déployer.
Comme l’amener à une dimension, une profondeur à laquelle toi, tu as maintenant accès peut-être grâce à ça, à cette pratique ou tout ce chemin. Qu’est-ce que ça produit, provoque, permet justement pour les patients dont tu prends soin ?
L’ACP va vraiment produire l’expression des besoins, la personne va se sentir écoutée, soutenue, accueillie, il y a vraiment quelque chose qui va se déployer, il y a une relation de confiance qui va naître.
Donc ça améliore la relation ?
Complètement, complètement. Vraiment.
Est-ce que ça améliore aussi le rapport à la maladie ou aux difficultés que la personne vit ?
Alors ça c’est différent. Pour le rapport à la maladie, je crois qu’on a prévu un petit temps après pour que je parle plutôt vraiment du focusing et comment je l’utilise à l’hôpital.
Bien et donc si j’étais infirmier, en quoi est-ce que ça pourrait m’intéresser ou être vraiment intéressant pour moi de m’intéresser au focusing et de suivre une formation par exemple?
Eh bien je te dirais que tu toucherais vraiment à la dimension d’écoute et tu apprendrais vraiment à écouter et qu’est-ce que c’est d’écouter, qu’est-ce que ça fait, qu’est-ce que ça produit, comment ça enrichit la relation avec le patient, avec les familles, avec tes collègues également. Parce qu’à l’hôpital c’est quelque chose qui est aussi présent que le lien avec les patients. Il y a le lien avec les collègues, et je crois que vraiment, ça enrichit tous ces liens-là. Pas juste avec les patients, mais aussi l’ambiance qui peut peut-être évoluer et changer. Complètement.
Ça a l’air très riche en tout cas, cette expérience-là d’écoute que tu me décris. Et dans ta vie personnelle maintenant, qu’est-ce que tu pourrais en dire ?
Ça m’a fait grandir, ça m’a fait me développer, ça m’a fait explorer des chemins nouveaux, ça m’a fait toucher des espaces en moi que j’ignorais, que je ne croyais même pas possibles. Ça m’a amenée sur ce qu’on appelle la tendance actualisante, c’est ce qui en nous a envie de grandir, de se développer, et ça m’a vraiment amenée sur ce chemin-là, et je dois dire que d’année en année, en expérience, ça continue.
Il y a vraiment quelque chose qui est à l’œuvre et qui est à l’œuvre depuis des années et ça ne s’arrête pas. Je suis de mieux en mieux dans ma vie. Je l’utilise pour ma famille, pour mes filles, pour mes nièces, je l’utilise pour mes amis et c’est toujours vraiment très bénéfique d’avoir cette compétence-là parce que n’importe quand, on peut venir me solliciter et je peux, par une séance de focusing, un temps d’écoute, amener la personne à faire un pas, à plus de bien-être, à solutionner quelque chose.
Je trouve que c’est super de pouvoir offrir ça à ses amis et à ses proches, c’est vraiment un beau cadeau que la vie m’a fait, de mettre sur le chemin du focusing et de l’IFEF.
Merci Nathalie, et à bientôt pour approfondir cette question de ce que ça peut apporter aux patients dans un autre podcast.
Des propos recueillis par Maxime Calay lors du séminaire d’été de focusing 2024
Crédits :
Photo : ecommunication – Léo Durand
Musique : Maxime Calay