Il correspond à la manière de vivre, de penser et de se représenter la réalité. Chaque personne a « un cadre de référence interne » qui lui est propre, ce qui fait qu’elle est distincte d’une autre.
Dans l’approche humaniste Centrée sur la Personne et Expérientielle, ce qui compte au cours de la rencontre c’est de percevoir l’autre (le client) à partir de son cadre de référence interne. Il est impossible de vraiment le comprendre et donc de l’accompagner dans son processus d’évolution sans s’approcher de la manière dont cet autre vit et perçoit la « réalité ».
Les attitudes d’empathie et de regard positif inconditionnel plus particulièrement, sont indispensables pour pénétrer la manière dont une personne vit une situation et se situe par rapport à elle. Dans cet accompagnement il est nécessaire de se départir de son propre point de vue (sa propre vision des choses) pour accéder à la façon singulière que cette autre personne a de vivre telle situation selon son point de vue à elle.
Ce cadre de référence implique le domaine des idées, croyances, valeurs (ce qui fait « cadre » et qui est déjà posé), mais aussi celui de l’expérience spécifique vécue en fonction des situations. Le domaine de l’expérience immédiate appartient à la partie non encore élaborée et « cadrée », elle s’inscrit dans une démarche de référence toujours en cours de réévaluation. Il revient au thérapeute de pouvoir suivre son client sur ce terrain expérientiel pour l’aider à procéder à sa propre évaluation à partir de son lieu d’évaluation interne.
Au cours d’une psychothérapie réussie, le client passe d’un cadre de référence externe (dicté par les croyances véhiculées par son milieu) à un cadre de référence interne. Ce cadre, relativement rigide au départ, évolue vers plus de nuances et de souplesse, il devient ajustable en fonction des situations qui se présentent. Le client prend de plus en plus comme critère sa propre dimension expérientielle, car celle-ci offre des repères internes qui lui permettent de s’adapter à la complexité des situations et d’aller dans le sens de ce qu’il cherche à réaliser.
« Qui porte plus loin », « qui fait progresser ». Toute situation « porte » implicitement le sens de sa propre progression. Ce qui s’inscrit dans cette progression naturelle, fait avancer le processus de manière adéquate.
Le terme « carrying forward » est au centre de l’approche processuelle selon Gendlin. Chaque situation porte en elle sa propre implication. Cette implication sera modifiée selon les étapes qui vont – ou non – s’actualiser à partir de là, mais c’est seulement au moment où se produit ce qui est impliqué que l’on peut dire que ce qui « était » implicitement est « porté plus loin ». Par exemple, vous avez faim : cela vous incite à trouver de la nourriture. C’est au moment où vous trouvez la nourriture que vous pouvez réellement dire que le processus a « avancé ». Dans ce cas-là l’implication est facilement décelable mais dans la démarche de changement thérapeutique, ou de création, ce qui est « impliqué » n’est pas rationnellement déductible a priori. Selon Gendlin, « de nombreux processus ne sont ni prédictibles à partir d’unités préexistantes, ni arbitraires ». Quelque chose de nouveau doit se produire qui va émerger à partir d’une complexité rassemblant de nombreuses connexions.
Il semblerait que les processus obéissent à une logique interne qu’on pourrait appeler le « sens de la situation ». Ce « sens de la situation » renvoie à tout ce qui est impliqué dans la situation (l’intrication implicite de la complexité) à partir de quoi une nouvelle étape de vie va prendre forme. Ce qui est implicitement impliqué « exige » un nouveau pas et lorsqu’il se réalise l’implication initiale se transforme donnant lieu à une nouvelle implication dans une continuité de processus.
Dans une démarche thérapeutique, ce qui fait progresser une situation (carrying forward) rend compte d’un changement bénéfique pour la personne – et son environnement en général. Il s’agit d’un processus qui dénoue et débloque une situation de souffrance jusque là figée et retenue dans son évolution naturellement « attendue » – l’implication véhiculée dans le malaise n’a pas encore trouvé une suite satisfaisante, à travers un nouveau comportement, une nouvelle manière de voir la situation, etc. L’implication est portée à travers une impression à la fois « floue » et « précise » qu’on appelle sens corporel – parce que non encore définie et cependant, en attente d’une définition très pointue. Lorsque l’implication « se réalise » elle constitue une « nouvelle manière d’éprouver, de vivre et de se relier à la situation. Cette étape apporte une nouvelle énergie, une nouvelle manière d’être et de vivre là où, jusqu’à présent, il n’y avait pas de voie ».Le mouvement global défini par « carrying forward » s’apparente à ce que Rogers met sous le terme « tendance actualisante ».
Au lieu d’agir sur la base de repères externes et conventionnels (à partir de rôles, de grilles de lectures a priori, etc.), il s’agit d’être ouvert à son expérience pour trouver comment être en relation de manière adéquate, personnalisée, souple, authentique.
Dans le cadre de la relation thérapeutique, le thérapeute cherche à être congruent. C’est une des trois attitudes de base de l’Approche Centrée sur la Personne et Expérientielle (avec l’empathie et le regard positif inconditionnel).
La dimension de la congruence s’actualise par une recherche de concordance entre ce qui est expériencé, conscientisé et enfin exprimé.
Pour en revenir au thérapeute,
« …ce qu’il expériencie est disponible à sa conscience, peut être vécu dans la relation et communiquer si cela convient. Ainsi y a-t-il harmonisation ou congruence entre ce qui est expériencié viscéralement, ce qui est présent à sa conscience et ce qui est exprimé au client ». ( Rogers,1977)
Le thérapeute, ouvert à sa propre dimension expérientielle, peut, tout au long de la relation, s’y référer et l’utiliser de manière adaptée, en fonction de ce qui se présente dans l’interaction – pratique de l’autoréférence et de l’autoévaluation. Cette référence directe à sa propre expérience, lui permet de modifier et réajuster d’instant en instant ses réponses et interventions pour une plus grande pertinence et efficacité au profit du client.
La démarche phénoménologique consiste à observer le plus directement possible les phénomènes relatifs à l’expérience, tels qu’ils apparaissent, sans interprétation, explication ou jugement liés à des systèmes de croyances et de représentations.
Dans un premier temps, elle consiste à observer sans idée préconçue le phénomène tel qu’il apparaît subjectivement et l’expérience vécue telle qu’elle se présente = « réduction phénoménologique » selon le phénoménologue allemand Husserl.
En effet, la plupart du temps, il est difficile de nous en tenir à ce qui est simplement présent dans l’expérience. Le plus souvent, nous appliquons sur l’expérience nos conclusions et les idées que nous avons à son sujet. Autrement dit nous ne faisons que reconduire ce que nous savons déjà.
En revenant à l’expérience, et en tentant simplement de la décrire, au plus près des phénomènes repérables, toute notion évaluative ou interprétative est écartée. L’esprit est absorbé par l’observation, centré sur la tâche de percevoir et repérer ce qui se passe expérientiellement pour pouvoir le « saisir » et le décrire précisément (il s’agit de définir le sens corporel en termes expérientiels). Aucun commentaire parasite ne subsiste.
Dans un second temps, il s’agit d’écouter ce que le phénomène pourrait vouloir nous signifier en accompagnant le processus d’explicitation, en laissant venir les idées, les mots qui émergent à partir du phénomène expérientiel et de la dimension implicite de l’ experiencing – pour Husserl = « phase de constitution».
Cette phase consiste à réintroduire les couches du sens, à laisser se développer la ou les significations implicitement contenues dans l’expérience (Gendlin). Il n’est pas question de se limiter à « sentir » et à percevoir le phénomène. L’être humain est dans une recherche de sens et de cohérence. Le sens n’est pas pure subjectivité solipsiste, il se forme à l’intersection de la subjectivité et de intersubjectivité qui n’existent pas l’une sans l’autre (le sens naît de l’interrelation). Le sens émerge comme exigence interne, directionnelle de la dimension expérientielle.
L’émergence du sens aura immanquablement une incidence sur le sens corporel et se traduira par un « mouvement corporel » (suite du processus de carrying forward)
L’Approche Humaniste Expérientielle se fonde donc sur une démarche phénoménologique qui met en œuvre le processus direct d’autoréférence.
C’est l’art de percevoir avec justesse et sensibilité le point de vue d’une autre personne selon son cadre de référence à elle, avec ses différentes composantes (cognitives, émotionnelles, expérientielles).
L’empathie est une des trois attitudes fondamentales de l’Approche Centrée sur la Personne et Expérientielle (avec la congruence et le regard positif inconditionnel).
Rogers est longuement revenu sur cette attitude qu’il a perçue comme essentielle dès le début de sa carrière : « très tôt dans ma pratique de thérapeute, j’ai découvert combien écouter simplement mon client très attentivement était aidant et important. » Plus tard il confirme :
« Etre empathique, consiste à percevoir avec précision le cadre de référence interne de l’autre ainsi que les composantes émotionnelles et les significations qui lui appartiennent comme si on était cette personne – sans jamais perdre de vue le « comme si ». (Rogers,1957-1980)
« Dans la rencontre d’instant en instant qui se produit en psychothérapie, l’élément le plus remarquable du travail du thérapeute est la capacité à comprendre avec justesse et sensibilité les expériences et les sentiments du client ainsi que les significations qu’ils ont pour lui. » (Rogers,1985)
D’une manière générale, l’empathie est largement reconnue comme variable importante dans la relation thérapeutique pour la compréhension du client. Depuis la notion d’ Einfühlung employé par Freud en tant que « condition sine qua non pour comprendre l’état mental de quelqu’un », jusqu’à aujourd’hui où elle a sa place dans différents courants psychothérapeutiques. Par contre, l’utilisation qui en est faite n’est pas identique pour toutes les écoles.
Dans l’Approche Centrée sur la Personne et Expérientielle, le thérapeute aide le client à trouver ses propres réponses et à définir les orientations de son existence. Dans ce sens, l’empathie du thérapeute procure au client suffisamment de sécurité, de compréhension, de reconnaissance pour qu’il se sente accompagné dans la recherche qu’il mène pour lui-même. Elle renforce, chez lui, son auto-exploration et son processus d’auto-évaluation –et donc son autonomisation. Au fur et à mesure, il en vient à se faire confiance et à se fier à des repères expérientiels internes pour apprécier les situations et choisir sa vie.
C’est l’expérience vivante en permanente transformation, telle qu’elle est ressentie globalement par une personne. Elle se modifie à travers les multiples interactions de son rapport au monde.
Pour Gendlin, l’experiencing (avec sa forme anglaise en « ing » que nous gardons pour insister sur la dimension « en train de se dérouler ») est un processus permanent, « un phénomène constant, toujours présent, sous-jacent, relatif à une dimension intérieure vivante et sensible. »
Rogers de son côté parle de « flux expérientiel » mettant en valeur l’aspect processuel de l’experiencing.
« L’experiencing se réfère à quelque chose d’observable directement » (d’où une démarche phénoménologique). « C’est une donnée présente, ressentie, implicitement signifiante ». La personne peut s’y référer directement pour former des concepts qu’elle peut vérifier en vis-à-vis de la signification implicite de l’experiencing. L’experiencing est porteuse d’une certaine forme de connaissance que l’on pourrait qualifiée d’élémentaire et de « primaire » et qui demande à être explicitée.
L’aspect directement observable et ressenti de l’experiencing, Gendlin l’a nommé « sens corporel ».
En termes psychologiques, l’implicite correspond à une dimension de soi difficilement saisissable, à peine perceptible bien que réelle. Ce qui se joue à ce niveau n’est pas encore explicité (conscientisée, reconnue). La dimension explicite développe sous forme de pensées ou autres modes (métaphorique, gestuel, artistique, etc.) une signification contenue implicitement.
A la différence de la dimension explicite, la dimension implicite ne contient pas d’éléments formés, elle n’est pas constituée d’unités distinctes. Elle renvoie à un « champ » où les « choses » coexistent dans une intrication première, à travers une sorte de réseau d’interférence. Elle désigne ce qui ne s’est pas encore formé mais participe aux processus de formation, d’élaboration, d’actualisation parce que rassemblant (implicitement) ce qui est en jeu dans toute situation. Par le focusing, il est possible de développer une manière de penser avec l’intrication implicite – en s’aidant de cet implicite.
Ce qui émerge à l’écoute de la dimension implicite, est porteur d’ordre et de cohérence. Le dispositif qui apparaît alors est capable de modifier les schémas douloureux et représentations erronées à l’origine de souffrances, il fait avancer le processus de transformation de la personne dans un sens constructif (carrying forward).
Sur le mode opératoire , la dimension implicite sous-jacente, renvoie à l’expérience de soi vécue globalement (experiencing), en deçà de tout ce qu’on peut en dire. Elle est néanmoins porteuse de sens et de signification pour la personne. Ce sens demande à être explicité. L’explicitation s’appuie sur un processus d’évaluation interne. En effet, en se servant du fonds expérientiel auquel il est possible de se référer (démarche de réflexivité), la personne trouve, dans la dimension implicite, une base à laquelle elle peut revenir pour former de nouvelles idées, découvrir de nouvelles orientations (Gendlin). Elle va trouver, à partir de là, comment modifier et ajuster ses comportements.
Ainsi, la dimension implicite, à travers le sens corporel, offre une base expérientielle (organismisque) au repérage interne. L’accord ou le désaccord interne (entre ce que je dis et ce que je vis réellement) deviennent apparents. En conséquence la démarche d’accordage – et donc la congruence – trouve un support concret directement opérationnel par la mise en corrélation explicite/implicite : l’« holomouvement » (terme emprunté au physicien David Bohm qui a travaillé sur les dimensions implicite/explicite de la « réalité ») rend compte d’une démarche de va-et-vient entre l’implicite et l’explicite en vue d’un ajustement permanent. L’explicite s’appuie sur la référence directe à l’expérientiel pour vérifier son adéquation et trouver de nouveaux prolongements, tandis que l’écoute de l’implicite à travers le sens corporel permet l’émergence de nouvelles informations. Le sens corporel se trouve ainsi à l’articulation implicite/explicite, comme interface.
C’est la marque d’un manque de concordance entre ce qui est expériencié, conscientisé et exprimé. Ce que la personne vit et ce qu’elle dit ne sont pas en accord.
L’incongruence est à la base de la pathologie, comme absence de correspondance et d’accordage entre ce qui est vécu et ce qui est consciemment disponible. Cette coupure entre ce qui est vécu et ce que la personne croit vivre entraîne des désordres et des incohérences. En retrouvant le chemin de son expérience immédiate ( experiencing), la personne retrouve l’accès à ce qu’elle vit. A partir de là elle peut modifier et réajuster ses représentations et apprendre quelque chose de neuf. Se rapprochant de sa dimension expérientielle, elle devient plus congruente, davantage reliée à ce qu’elle est véritablement. Elle (re)trouve une nouvelle intégrité.
« Parmi ses objectifs concernant le développement de sa théorie, Rogers cherchait à clarifier le phénomène de l’ incongruence entre la conscience et l’expérience, à la base de la pathologie, de même qu’il cherchait à définir le processus de changement, de l’ incongruence à la congruence, processus au cœur de la théorie du changement de la personnalité. Dans ce sens, le terme « expérience » devait être redéfini en termes observables. Il devait être pensé en tant que processus dynamique plutôt qu’en tant que contenus stockés qui viendraient à émerger au cours d’une thérapie réussie. La question fut en grande partie résolue par la définition donnée par Gendlin du terme « experiencing ». Il s’agissait dès lors d’une donnée de base ressentie, servant de référent à la conscience. Ce référent était susceptible de changer à partir de quelque chose de pauvre, inconsistant, rigide vers quelque chose de plus riche, concret, en lequel il est possible d’avoir confiance, ce qui est significatif d’un changement de l’incongruence à la congruence. » (Klein & all,« The experiencing scale »)
La personne évalue les situations à partir de ses propres critères plutôt qu’à partir de repères externes (les « il faut », « on doit »…).
Cette évaluation peut être fondée sur des systèmes de valeurs et de représentations ou, plus directement, sur la dimension expérientielle, ce qui permet une plus grande souplesse/adaptation/modulation en fonction des situations.
Au cours de la démarche thérapeutique , l’évolution du client se fait dans le sens d’une appropriation de son cadre de référence interne. La personne accède à des processus d’évaluation interne fondée sur des repères de plus en plus expérientiels.
« Le continuum débute par une fixité où l’individu est très éloigné de son experiencing et dans l’incapacité d’en tirer ou d’en symboliser sa signification implicite. … L’experiencing devient graduellement un référent interne mieux accepté, vers lequel il peut se tourner pour obtenir des significations de plus en plus exactes. Finalement, il devient capable de vivre librement et en s’acceptant, selon un processus expériencié fluide et qu’il utilise avec aisance comme référent majeur pour son comportement. » (Rogers,1961)
Comme le note Gendlin (1964) « nous ne remplaçons pas les jugements des autres personnes par d’autres jugements. Nous appuyons plutôt nos évaluations et notre conduite directement sur notre expérience. »
L’ensemble de la démarche du focusing contribue à développer son lieu d’évaluation interne à partir d’un processus autoréférentiel. En écoutant la dimension expérientielle, des repères expérientiels signifiants apparaissent qui donnent des informations précises sur la manière de se positionner et de répondre aux situations de façon appropriée.
Cette dimension « ne renvoie pas seulement à la structure physique et biologique de l’individu, mais à l’individu en tant que totalité psycho-physique interagissant comme un tout avec son environnement. » (note du traducteur du « développement de la personne » -1966)
Ce terme, souvent utilisé par Rogers, renvoie à la notion d’ experiencing, puisqu’il s’agit de ce qui est corporellement vécu et ressenti, en rapport avec le contexte relationnel. Gendlin parle plus souvent d’experiencing, mais il emploie aussi ce terme, en référence à Rogers, dans certaines expressions, « organismic knowing » en équivalence à « experiential knowing » (savoir organismique, expérientiel), « organismic experiencing » (« expérience organismique »).
Toute la démarcheACP/Focusing se situe dans une approche processus et non une approche centré sur le contenu. La démarche processuelle met l’accent sur le mouvement, le changement, la capacité de partir de ce qui est pour aller vers ce qui “appelle” à être dans un mouvement de transformation vers un mieux-être. Gendlin parle de “process model” avec la notion centrale de “carrying forward” (ce qui porte plus avant), B. Lamboy de “logique du processus émergent”. On retrouve cette notion en lien avec la Tendance Actualisante de Rogers.
Il consiste à communiquer au client le sentiment de sa propre valeur en dehors du contenu (et de la valeur) du discours, des intentions, des actes qu’il manifeste – inconditionnalité. Ce regard est fait d’ acceptation, intérêt réel, estime, chaleur humaine,absence de jugement
Le regard positif inconditionnel est l’une des trois attitudes fondamentales de l’Approche Centrée sur la Personne et Expérientielle (avec la congruence et l’ empathie).
« Quand le thérapeute expériencie une attitude positive, acceptante face à ce que le client est à ce moment là, il est probable qu’il se produira un changement thérapeutique. Le thérapeute veut vraiment que sont client puisse exprimer son sentiment présent quel qu’il soit – confusion, ressentiment, peur, colère, amour, orgueil. Un tel soin de la part du thérapeute est non possessif. » (Rogers, 1980)
Le regard positif inconditionnel restaure une condition dont le client a souvent été privé lors de son éducation (regard conditionnel des parents) et dégage le client de toute pression moralisante.
Le jugement nuit à la relation parce qu’il interfère sur une réelle écoute.
Dès qu’on se sent jugé, on cesse de s’exprimer ou bien on le fait maladroitement (avec violence, résistance, justification, accusation, etc.…)
Important :
Le soutien et l’encouragement n’ont pas trait aux contenus et ne sont pas synonymes d’adhésion à ce que dit ou manifeste le client. Ils vont à la personne, à ce qu’elle éprouve dans le présent, au besoin qu’elle cherche à signifier, à la reconnaissance de ce qu’elle vit. Il s’agit de repérer l’intention constructive qui cherche à se manifester, parfois à travers des comportements déviants, inadaptés, antisociaux…
Distinguer les objectifs poursuivis par le client, des moyens mis en œuvre.
Il s’agit d’une impression le plus souvent vague au départ qui accompagne les situations que nous vivons. En y portant attention, cette impression se définit et se précise, pouvant nous donner des informations utiles sur ce que nous vivons.
« Sens corporel » est la traduction de « felt sense » ou « bodily felt sens ». On pourrait encore le nommer sens expérientiel ou ressenti corporel. En français, le mot impression* rend la dimension vague du sens corporel à son début.
* impression : « forme de connaissance élémentaire, immédiate et vague que l’on a d’un être, d’un objet, d’un événement » (définition du Robert)
« Le sens corporel est la sensation globale et vague qui se rapporte à l’ensemble de la situation. » (Gendlin in Focusing) Le sens corporel est la dimension observable de l’ experiencing, il est concrètement ressenti par le corps.
Par l’attention qu’on lui porte, il devient possible de le situer précisément dans l’espace corporel et de le décrire en termes précis, souvent imagés. En restant à son écoute, de nouvelles informations vont émerger qui donneront à la personne une nouvelle compréhension de la situation et de nouvelles pistes.
Il constitue un repère fondamental (repérage interne) dans la démarche du focusing en tant que référent direct. S’y référer permet une constante évaluation de sa propre manière de vivre les situations. Il entre comme donnée de base dans le processus d’évaluation interne.
La tendance actualisante fait référence, chez Rogers, au potentiel de transformation et d’évolution de chaque personne inscrit au plus profond de son être.
Chaque personne a des ressources et des compétences – qui ne sont pas toujours utilisées – mais qui sont prêtes à se révéler dans certaines conditions.
« On peut dire, précise Rogers, que dans chaque organisme (pas uniquement humain) , à quelque niveau que ce soit, il existe un flux sous-jacent de mouvement vers la réalisation constructive de ses possibilités inhérentes. »(Rogers 1980)
La « tendance actualisante » n’est pas uniquement la tentative de se maintenir et de se reproduire, elle implique un processus actif dans le sens du développement et de la croissance.
Elle concerne le processus global de l’organisme et se manifeste comme un flux directionnel qui va dans le sens « d’un développement plus complexe et plus complet ».
Elle vise à la fois la différenciation/autonomisation et une plus grande intégration/harmonisation.
La personne accède d’autant mieux à ses ressources qu’elle bénéficie d’un certain contexte relationnel (attitudes définies par Rogers).
Dans le focusing, ce mouvement de transformation, appréhendé sous forme de processus est qualifié de « carrying forward » (Gendlin) (ce qui porte plus avant). Il existe naturellement et il se développe spontanément à un niveau expérientiel, dans la mesure où l’experiencing est un processus en transformation permanente qui, dès lors qu’on lui accorde de l’attention, s’oriente selon sa propre cohérence dans le sens d’une réorganisation bénéfice pour la personne.
En s’engageant dans une démarche expérientielle, la personne recontacte directement le vivant en elle et sa puissance de transformation.
« Grâce à cette dimension directement expérienciée, un processus de changement positif et régulateur peut se manifester et il peut en résulter une personnalité mieux adaptée et plus constructive. » (Gendlin, 1964)
Concerne, selon Rogers, le potentiel de transformation à l’échelle de l’univers qui ne cesse de créer de nouvelles formes, de nouvelles structures, de nouveaux types d’organisation.
Il s’agit d’un mouvement opérant vers un ordre et une complexité grandissants, qui fait preuve d’auto-éco-organisation et d’auto-éco-création – selon un processus interne qui tient compte des différents paramètres impliqués.
La tendance formative et la tendance actualisante se rejoignent pour former les « deux piliers de l’ACP » (Rogers) :
« Nous nous mettons à l’unisson d’une tendance créative puissante qui a formé notre Univers depuis le plus petit flocon de neige jusqu’à la plus large des galaxies, depuis la plus modeste amibe jusqu’à la personne la plus sensible et la plus douée. » (Rogers, 1980)
Vision holographique et écologique :
La vie, qui porte le processus évolutif, habite aussi bien l’homme que le monde.
Le processus de développement obéit à une même logique interne à l’échelle individuelle et à l’échelle cosmique ( « carrying forward », Gendlin).
Chaque singularité véhicule l’ensemble des implications qui l’ont conduit à être ce qu’elle est. Ainsi :
« Votre corps fait partie d’un système gigantesque qui comprend plus que l’endroit et le moment où vous vous trouvez et plus que vous-même : il englobe en fait l’Univers entier. Nous percevons à l’intérieur de notre corps cette sensation de vivre au sein d’un vaste système. » (Gendlin,1978)
Chaque personne participe à ce vaste processus, en tant que « créée » (dans sa forme réceptive) et « créante » (dans sa forme active).